Voici un petit "pas à pas" peut-être un peu déplacer sur ce forum mais c'est du travail du cuir et certains trucs sont transférables et puis les chasseurs à l'arc ou ceux qui recherchent une chaussure sensitive et silencieuse seront peut-être interessés... aprés si cela semble trop HS pas de soucis pour la supression du post...
Voici donc un "pas à pas" dans la réalisation d'une paire de type III (chaussure typées 11ième siécle) réalisées en cousu-retourné.
Le patron a été établi quelques mesures prise avec le futur propriétaire (un périmètre de pied, une mesure au niveau du coup de pied)...
Mais établir un patron pour soi quand on a pas l’habitude est assez simple, il suffit d’avoir :
- une paire de chaussettes sacrifiables
- un rouleau de scotch d’emballage (éviter l’elastoplaste c’est élastique et c’est gênant ici)
- une paire de ciseaux à bout rond (capables de couper le scotch
- 1 gros marqueur
- Eventuellement 1 bon copain, 1 épouse, 1 gamin ou n’importe qui capable de marquer des traits alors qu’on est debout.
Le modus operandi est le suivant :
- enfilage de la chaussette (des deux si on est pas symetrique des pieds)
- emballage du pied « chaussetté » avec le scotch d’emballage
- tracé des futures pièces en direct (si possible en charge car le pied à tendance à s’affaisser)
- découpe selon les lignes avec les ciseaux…
Vous avez votre patron perso, il n’y a plus qu’à reporter sur une peau en tenant compte d’une petite marge de couture est de retournement… Si vous êtes d’un naturel prudent vous pouvez faire un « blanc » en utilisant une vieille toile cirée un peu épaisse à la place du cuir…
Pour trouver des patrons, un petit tour par ici (il y a aussi tout un tas de trucs techniques j’ai quasi tout appris là) :
http://www.personal.utulsa.edu/~marc-carlson/shoe/SHOEHOME.HTMLa page patrons est dans la partie shoes design. Je vous conseille de plutôt commencer par un truc simple comme le type III des fouilles de York :
http://www.personal.utulsa.edu/~marc-carlson/shoe/SHOES/SHOE5.HTM Le type IV est pas mal mais tiens moins bien au pied je trouve…
Passons à la phase cuir maintenant.
Un petit inventaire du matériel standard sera fait au fur et à mesure...
Le patron est donc rapporté sur les différentes pièces de cuir, il faut un crayon papier gras ou une pointe sèche et il faut mieux éviter le feutre ou le bic qui sont bien pratiques mais laissent souvent des marques qu'on aurait pas souhaiter (surtout en reconstit puisque il y a toujours un gus (moi le premier éventuellement) pour regarder dans une chaussures et déplorer la trace de stylo à bille ou de feutre)...
Les pièces sont découpées (un cutter ou un couteau de savetier pour ma part et une bonne planche à découper et éventuellement une bonne protection du plan de travail (ça évite de saloper la table de la cuisine lors d'un rippage de lame (vécu))), ici le cuir de semelle fait 6-7 mm en bovin (du buffle ou du taureau à l'odeur) et l'empeigne fait 1,8 (du veau la je suis sûr de mon coup)...
Je vérifie brièvement la conformité des pièces entre elles et je prends quelques point de repères (pas facile à expliquer sur le net par écrit).
Puis les pièces vont à la trempette dans l'eau froide...et je teinte en fonction des envie (je suis dans les essai de teinture en ce moment (teinture moderne cependant (l'histo teinture pur jus ce sera pour plus tard)). Je teinte aussi le futur lacet (découpé dans la même peau pour des soucis d'homogénéité de teinte).
Les deux bandes latérales sont pas de la même longueur mais c'est pas important pour l'instant...
Je fais ensuite une rainure dans la semelle avec une petite gouge (mais avant de l'avoir un compas à pointes séches un peu aiguisé faisait bien la farce) puis je perce ma semelle pour les futures coutures d'assemblage, on perce donc en utilisant une forte alène et comme le montage est un cousu retourné on prend bien soin de percer avec un angle de telle sorte que le trou de sortie sit par la tranche.
J'ai pris la mauvaise habitude de travailler en coinçant mes pièce de cuir entre mes genoux, quand l’allène rippe elle finit plantée dans ma cuisse (avant je travaillais un peu différemment et je me la collais dans la main)... un avantage ça réveille.... Il y a moyen de percer en utilisant un martyr comme support... j'aime pas. et puis ma façon de faire on la retrouve sur l'iconographie montrant des savetiers au travail.
le perçage :
l'allène en place dans un trou :
et en gros plan (où l'on voit bien que ça ressort par la tranche et pas par la face inférieure) :
Ensuite vient la couture et d'abord le montage de l'aiguillée :
on enfile :
on passe le fil dans le fil :
on tire et hop le fil est bien bloqué sur l'aiguille il risque pas de se souver (et ça ne gène pas la couture) :
et on refait la même chose à l'autre extrémité du fil pour avoir une aiguille à chaque bout :
en suite on aligne les pièces (il faut penser à comment sera la chaussure au final) :
Puis je démarre ma couture en me servant des repères d'alignement... Je perce à l'allène mon empeigne en me guidant sur les trou de la semelle (comme ça tout est bien aligné), bien sûr tout est monté à l'envers, on retournera aprés...
et la couture se fait donc à deux aiguilles en point sellier, voici un petit film
FILMon fini par obtenir ça (il y a un excèdent mais c'était prévu et comme dans beaucoup de cas il vaut mieux être long que court) :
on rabat l'excèdent à l'intérieur pour pouvoir prendre des marques et le couper :
Il existe une alternative élégante à l'aiguille (bien que celle-ci soit historiquement correcte) c'est le ligneul réalisé avec en lieu d'aiguille une soie de sanglier....
Je réussis à monter les miens et ils sont maintenant relativement fiable, mais j'ai quand même du mal à coudre sur des grandes distances avec... donc je leur préfére encore l'aiguille de sellier (une aiguille de sellier n'a pas de pointe).
Je passe ensuite toute les coutures (généreusement) à la cire d'abeille liquide, au pinceau...
en insistant sur la semelle et la jonction empeigne semelle.... si ça se trouve cela ne sert à rien mais je pense que ça protège le fil et que ça améliore le confort point de vue humidité.
Je perce mes trous pour la couture finale, comme je la réalise en "bord à bord" je procède comme pour la semelle et je ressort donc mon allène dans la tranche du cuir (on voit assez mal là) :
et pas vraiment mieux là :
Je préfère avant de tourner mais on peut aussi le faire après, dans ce dernier cas c'est mal pratique pour percer, dans ma façon de faire on retrouve parfois pas le trou...
Bon ça a déjà maintenant une tête de chaussure mais les coutures sont à l'extérieur et ça ne ferait pas long feu.... Il faut donc les retourner.
On passe donc à la trempette (dans l'eau la plus froide possible pour moi, j'ai toujours trouvé le cuir moins beau après avoir trempé dans l'eau chaude)
Pendant ce petit bain j'en profite pour masser le cuir dans tous les sens (doit être une déformation pro) et pour monter les aiguillées qui vont me servir pour la couture latérale.
Puis retournement, j'utilise un manche à balais et je commence par l'arrière de la chaussure... c'est parfois long et pénible (pour cette paire j'en ai baver avec du cuir de 6-7) mais ça se retourne, pas de découragement, pas non plus de brutalité sous peine de déchirer les coutures qui à ce moment là sont hyper tendues (une raison pour laquelle je fait pas de noeuds à tous les points, le fil peut comme ça jouer un peu et la tension s'équilibre au fur et à mesure de la progression).
voici la chaussure en cours de retournement sur son manche à balais :
On retourne ça bêtement comme une chaussette en fait (sauf que c'est plus facile pour une chaussette).
Voici la vidéo faite pour une autre paire :
http://s24.photobucket.com/albums/c27/berbove/gougou%20le%20making%20off/?action=view¤t=retournementchauss1.flvhttp://s24.photobucket.com/albums/c27/berbove/gougou%20le%20making%20off/?action=view¤t=retournement2.flvUne fois retourné, on passe à la couture finale :
Puis je perce les tunnels pour le passage du lacet (ce n'est pas mes doigts qui font contre appui sous la lame, je tiens un martyr en bois que l'on voit pas bien sur la photo) :
Essayage pour voir si tout est ok... (même si elle sont pas pour moi en final, la taille du futur porteur est pas loin de la mienne et ça ça aide beaucoup) :
Voilà c'est quasi finit, elles vont finir de sécher sur forme (c'est mieux) et j'attaquerais les finitions) :
Et voilà le produit fini :
La méthode de réalisation est historiquement correcte...
C'est globalement trés confortable, surtout si vous avez l'habitude de marcher pieds nus... J'ai déjà fait des randos de 25 km avec les miennes sans soucis cutanés ou autres...
Mais les chaussures finissent quand même par s’user et là pas trop de soucis pour les réparer….
Mes godasses persos ont des petits soucis aprés un an de loyaux services : 2 Ost en marche (1 vingtaine de km à chaque fois), Hastings, une saison humide (très), des entraînements d’escrime tous les lundi soirs sur un sol moderne, plus certains week-end sur le goudron... Après la semaine passée à Eu, ou je les ai porté en permanence, je les ai un peu oublié, humides, dans un coin... dehors...
Voici les dégats (les deux sont exactement dans le même état et symétriques) :
- cuir en piteux état
- coutures lachées en latérales et par endroits dessous
- trous dans la semelle
Une petite réparation s'impose, j'aime ces chaussures et la tiges est bonne...
démontage (il suffit de mettre un coup de lame affutée dans le fil d'assemblage en faisant attention de ne toucher que le fil) et inspection des deux partie, si la semelle est à jeter, la tige est récupérable encore au mons une fois, peu de trous sont déchirés...
La nouvelle semelle est découpée selon l'ancienne en reportant celle-ci sur la peau, attention de bien penser à faire une droite et une gauche (rigoler pas je fais réguliérement la bourde et je suis pas le seul) puis percée(classiquement comme au dessus) grosso modo au pas de l'ancienne (ça tombe bien j’ai un pas de perçage à peu prés standart puisque avec l’habitude j’utilise des repères anatomiques perso (un petit demi travers de doigt), et accessoirement comme la forme est bonne pour moi j'en profite pour reporter le patron complet sur un carton fort que je stocke... comme ça pas de prise de tête au patronnage quand j’en referais des neuves complète…
Trempette qui a l'avantage d'assouplir le cuir avant de le recoudre (sinon les plis sont trés marqués) et aussi de le nettoyer (frotte-frotte à la brosse)...
début de la couture selon la méthode classique du point sellier, ce trou est déchiré :
donc je reperce à l'alène un peu (pas trop) au dessus :
coutures inférieures terminées, il ya plus qu'à la retourner et à faire la couture de fermeture :
et hop aprés l'opération finale :
Cette nuit séchage sur forme, demain graissage-cirage... et les voilà reparties pour un an...
durée de l'opération 2 heures (1 heure par pompes, sans se presser, sans stresser), coût le cuir pour 2 semelles soit une dizaine d'euros...
Pourquoi s'en priver...
Y a pas mal de modèle possible j’en ai mis quelques uns sur ma zone webshots, n’hésitez pas à visiter, si vous avez des problème de visualisations je posterais quelques autres photos ici…
Lambda en fait aussi de très belles avec une autre expérience du terrain.
Actuellement je suis sur une paire de chaussures romaine (il faut que je forge les clou puisque eux en avez) et des bottes de Novgorod du XIIIième siècle… des chaussures XVième aussi qui seront mais premières à trépointe et double semelle…
Je suis prêt à échanger sur ce sujet ou à vous guidez du mieux que je pourrais si vous souhaitez vous lancez...